De la destruction de valeur

Le 17 Mai 2021 Apple annonce que les abonnés au service de streaming Apple Music pourraient prochainement écouter les fichiers en haute qualité, à savoir la qualité dite “lossless” c’est à dire l’équivalent d’une qualité CD mais aussi la qualité “spatial audio”. Autrement dit, ce qui coutait 14,99 €/$ chez les concurrents coutera désormais 9,99€ chez Apple.

Quelques heures après, Amazon réagit en baissant immédiatement son prix de 5 €/$ : l’offre Amazon Music Unlimted qui inclus la haute qualité sera désormais facturée au prix “de base” de 9,99 €/$

Les initiatives à succès pour augmenter la valeur économique du streaming et instaurer une différenciation entre l’offre « de base » et l’offre « haut qualité » se voient sévèrement attaquées.

En 24H00, une destruction de valeur sans précédent dans le marché du streaming musical.

Rappel des faits :

QUINZE ANS POUR REMONTER LA PENTE

Premier secteur a être touché par le tsunami numérique, la filière musicale est aussi la première à se relever et à trouver un nouveau modèle économique grâce au streaming.

Avec une progression de+7,4% dans le monde, le marché de la musique dans le monde  dépasse désormais la barre des 20 milliards de dollars et retrouve à peine son niveau d’avant la crise, c’est-à-dire de l’année 2003.

15 années de crise ! Il aura fallu 15 ans pour “remonter la pente” comme on peut le voir sur ce graphique :

UNE NOUVELLE FACON DE MONETISER LA MUSIQUE

Le Streaming apparait en 2007 et 2008 et en une dizaine d’années permettent de reconstituer une partie de la valeur disparue dans l’ouragan du numérique. Les services de streaming permettent de monétiser la musique dans un monde ou le piratage existe toujours comme détaillé ici

IL EXISTE UN CONSENTEMENT A PAYER…A PAYER PLUS CHER

Militant de la première heure pour la musique digitale et la haute qualité, Yves Riesel crée, en 2008, la société qobuz -reprise depuis par Xandrie en 2016- et démontre que les consommateurs sont prêt à payer pour un abonnement en haute qualité, une qualité sonore au moins égale à celle du CD. Il revient sur cette aventure ici

TIDAL emboite le pas, puis Deezer et d’autres ensuite. Spotify avait décidé également d’investir ce segment prochainement

Tous ces acteurs démontrent qu’il existe un CONSENTEMENT A PAYER et qu’il est possible d’introduire plus de valeur avec des abonnements haut de gamme grâce à une segmentation consommateur plus fine. Ces services de musique, possèdent certes moins d’abonnés, mais génèrent un revenu par abonné (ARPU) bien supérieur aux grandes plateformes de streaming créées par les GAFA. Une différenciation des prix vertueuse qui apporte plus de revenus aux ayants droits.

Il aura fallu donc moins de 24H pour détruire cet édifice. Car pour les géants de la tech que sont Apple et Amazon, il est beaucoup plus facile d’utiliser la musique “haute définition” – quitte à flirter avec la vente à perte- pour vendre des équipements et autres produits. Une destruction “Schumpterienne” (Mr Joseph Schumpeter) qui détruit de la valeur mais n’en crée que pour les fabricants de matériels.

La création a une valeur. Présentée avec un service de qualité, les consommateurs sont prêts à payer pour cette valeur.

A l’heure ou le débat sur le « partage de la valeur » fait rage, Il serait bon de veiller à ce que la valeur ne disparaisse pas …sinon il n’y aura plus rien à se partager. L’action doit venir des détenteurs de droits pour protéger la valeur de la création.

Et pour citer Andrew Lloyd Weber  

‘The fine wines of France are not merely content for the glass making industry’,

CROISSANCE ET CHALLENGES DU STREAMING AUDIO

closeup iphone and earpods device on table

Le début de l’année 2020 est marqué encore une fois par la parution les chiffres de croissance du marché de la musique. Comme chaque année depuis trois ans, ces chiffres sont impressionnants.
En 2019, aux Etats Unis, pour la troisième année consécutive le marché marque une croissance à deux chiffres soit +13,5% dopé par le streaming qui croit de +32%.
Aux Etats Unis, le streaming représente déjà 85% de la consommation de musique.
Le Japon, 2e marché mondial de la musique devrait publier ses chiffres sous peu.
3e marché mondial : L’ Angleterre. Le marché anglais augmente de +7,1% et le streaming  par abonnement représente plus de 71% du marché. Tous les détails ici 
En France les chiffres du marché 2019 seront communiqué par le SNEP le 25 Février et j’y reviendrai sur le blog d’EMIC

 

LES CHALLENGES DES SERVICES DE STREAMING

Si les résultats et prévisions sont très encourageants, pour les artistes, ayants droits et distributeurs, les plateformes de streaming musical, elles, doivent faire face à plusieurs challenges. 
Spotify on iPhone 6

Changement de paradigme et de relations avec les ayants droits

Le streaming c’est à la fois une écoute ET une vente : Le streaming devient “RATAIL” (RADIO+RETAIL) est à la fois RADIO et RETAIL ce qui a des implications importantes. Dans l’ancien monde, les passages radios faisaient accroitre la notoriété de l’artiste et provoquaient la demande et donc les ventes. Dans le monde du streaming c’est tout à la fois. Pour les plateformes de streaming ce n’est pas un problème car leur ressources humaines et financières sont toutes focalisées sur l’acquisition et la rétention client, mais pour les artistes et les labels, cela change complètement les approches de stratégie marketing et développement d’artiste. Le passage du modèle de la possession au modèle de l’accès a du remettre en cause toutes les stratégies marketing, pour basculer le “push marketing” vers du “pull marketing” comme déjà évoqué sur ce blog dès 2015.

Combattre dans l’économie de l’attention.

Avec internet et l’accès illimité aux contenus de divertissements nait, il y a une petite vingtaine d’année, “l’économie de l’attention” qui définit l’attention du consommateur comme une ressource rare comme le décrivait Yves Citton dans son ouvrage “L’économie de l’attention”
Une journée étant limitée à 24 heures, chaque minute de “consommation” est, désormais, “prise” sur un temps pour faire autre chose. Il n’y a plus de temps libre à conquérir si ce n’est le sommeil. “Mon principal concurrent, c’est le sommeil” déclarait Reed Hastings, co-fondateur et CEO de NETFLIX dès en 2017 dans une interview au Guardian. 
Les services de streaming musical doivent combattre dans cet environnement, dans un marché de l’attention face aux géants comme Facebook, Netflix, Google (Youtube), Microsoft (Xbox notamment), mais aussi Steam, Snap, TikTok et toutes les nouvelles plateformes d’entertainment, sans oublier les médias qui se battent pour gagner chaque minute d’attention du public ou « temps de cerveau humain disponible », selon l’expression celèbre formulée en 2004 par Patrick Le Lay, alors président-directeur général du groupe TF1.
Le marché de l'”attention audio” est arrivé à saturation. La radio perd des “part de marché d’audience”. Comment faire la différence ?
Jimmy Iovine, grand personnage de l’industrie musicale, déclarait récemment au New York Times: “the streaming music services are utilities — they’re all the same. Look at what’s working in video. Disney has nothing but original stuff. Netflix has tons of original stuff. But the music streaming services are all the same, and that’s a problem.

Comment se différencier ?

Une première différenciation est apparue il y a quelques années sur la qualité audio. Ainsi Tidal et qobuz propose une qualité supérieure depuis quelques années mais c’est désormais le cas pour Amazon avec Amazon HD et Deezer avec Deezer Hi Fi
Une différenciation par le mode d’utilisation me semble manquer cruellement. Le couplage Abonnement d’un mois / 1 niveau de prix (9,99€ pour le standard et 19,99€ pour le haut de gamme) m’apparait trop restrictif, même si certains acteurs adresse désormais la famille avec une offre un peu plus chère pour 6 comptes,
Je constate que seul Amazon a cinq niveaux de différenciation prix, en segmentant par l’usage ET le prix :
Un premier niveau gratuit pour les utilisateurs d’Alexa qui peuvent streamer des “radios” ou des playlists conçues par Amazon Music
Un deuxième niveau pour les membres Amazon Prime (49€ par an en France) qui ont accès gratuitement à 2 millions de titres
Un troisième niveau “Echo Plan” pour ceux qui possèdent une enceinte connectée Echo, l’abonnement Amazon Music ne leur coûte que 3,99€ mais leur écoute n’est possible que via leur enceinte.
Un quatrième niveau assez “standard” avec un abonnement musique illimité (Amazon Music Unlimited) pour 9,99€ mais avec un prix réduit à 7,99€ pour les abonnés prime
et toujours un cinquième niveau de prix pour les offres famille
Autres axes de différenciation  : Les contenus personnalisés, l’éditorial, et le “boom” du podcast en est la preuve. Spotify et Deezer investissent massivement sur le podcast quand qobuz mise sur l’éditorial. J’y reviendrai prochainement sur ce blog. Une cartographie du podcast se trouve ici, témoignage de la bonne croissance de ce segment.
Il me semble que la préservation des données personnelles devrait être un axe de différenciation. Personnellement je n’ai aucune visibilité de l’utilisation de mes données personnelles… “Privacy” le nouveau positionnement ?

Marge et rentabilité.

Le plus grand challenge reste la rentabilité. Comme déjà développé sur ce blog en 2016 : sur un abonnement à 9,99€ si on enlève la TVA et le reversement aux ayants droits (recording et publishing), il reste un peu plus de 2€ par abonné pour pouvoir absorber les frais fixes ( dont les frais techniques et les frais de personnel) et faire le marketing et l’acquisition client. Compte tenu du fait que le modèle économique est proportionnel et basé sur pourcentage des revenus, le taux de marge reste identique à l’inverse des modèles comme Netflix et Disney + ou le modèle de rémunération des ayants droits n’est pas proportionnel. Ainsi plus Netflix élargit sa base client et plus son taux de marge augmente.

 

Le streaming audio a de belles années devant lui.

Selon une étude de Goldman Sachs d’ici 2030, 1,15 millards de personnes dans le monde seront abonnés à un service de streaming. Mais, dans un environnement de la guerre de l’attention, les services de streaming doivent trouver leur positionnement et leur axe de différenciation mais aussi une meilleur marge pour survivre.

MUSIC INDUSTRY : THE COMEBACK

Spotify on iPhone 6

Après des années de crise, l’industrie de la musique connait une vitalité sans précédent.

CROISSANCE DU MARCHE

Après des années de crise et de disette, l’industrie de la musique connait une croissance continue depuis 4 ans. Et sa bonne santé dépasse toutes les espérances.

Le marché mondial de la musique se porte très bien, même si ce marché n’est pas encore revenu à son niveau de 2001, année record qui correspond à l’apogée du marché du CD. (Je situe l’apogée du CD et le début de la prise de conscience de la révolution internet à 2001 aux Etats-Unis, année du procès Napster. J’avais détaillé cela il y a déjà plus de 4 ans sur mon blog)

En 2018, comme détaillé ici avec près de 10% de croissance mondiale, l’IFPI (fédération internationale des industries de la musique enregistrée) annonçait un nouveau record historique de croissance.

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Cette croissance est portée par les marchés matures mais est beaucoup plus forte sur des marchés « jeunes » comme l’Amérique du Sud ou l’Asie.

En France, le marché de la musique enregistrée connait aussi un renouveau sans précédent.  Le SNEP (syndicat français des éditeurs phonographiques) qui publie les résultats du premier semestre 2019, se réjouit d’un marché français en hausse de près de 13% porté par une croissance du streaming de plus de 28%.

Aux Etats Unis au premier semestre 2019, le streaming s’est imposé comme la première source de revenus et marché a connu une nouvelle croissance sans précédent. En effet le marché américain marque une progression de + 18%.  A lui seul, le marché du streaming représente 80% et a progressé de +31% pour atteindre 4,3 Milliards de dollars.

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MUTATION NUMERIQUE REUSSIE

Dans la plupart des marchés mature, le numérique a dépassé le physique depuis quelques années déjà.

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Certes cette mutation ne s’est pas déroulée sans souffrances, mais on peut aisément dire -avec l’essor du streaming confirmé depuis 4 ans- que l’industrie de la musique, première industrie créative a avoir été touché par la « révolution internet », a réussi sa mutation.

En France, au premier semestre 2019, le numérique représente déjà 68% des revenus de musique enregistrée.

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CROISSANCE DES EMPLOIS

Nous ne sommes plus là dans une croissance « schumpéterienne » à somme négative, terme barbare du nom de Joseph Schumpter, économiste qui théorisé la « destruction créatrice », processus par lequel, une innovation technologique détruit un secteur économique et donc des emplois, en parallèle du développement de nouvelles activités et de nouveaux emplois.

Peu d’études sont publiées sur l’employabilité dans la filière musicale mais nous pouvons constater à l’EMIC que tous nos étudiants trouvent un emploi dans la filière musicale en France dans un temps record, et bien plus vite que la moyenne nationale.

Music Business Worldwide analyse l’emploi au sein des deux plus grosses majors compagnies UNIVERSAL et WARNER MUSIC et révèle que ces deux majors emploient au total 13 000 personnes dans le monde soit 3000 personnes de plus qu’en 2012.

LA CONFIANCE DES INVESTISSEURS ET DU MONDE DE LA FINANCE

L’intérêt croissant des investisseurs et du monde la finance pour le marché de la musique est un signe qui ne trompe pas comme souligné ici

Le dernier exemple criant est TENCENT le géant chinois des médias qui s’engage à acquérir 10% d’Universal pour un multiple de 33 fois l’EBITDA

Le marché de la musique va-t-il continuer à croître ?

La réponse est oui.

La croissance du marché va continuer encore de nombreuses année grâce à :

UN MARCHE DU STREAMING QUI A ENCORE DE BELLES ANNEES DEVANT LUI

Le marché du streaming représenterait d’ici 2024 l’essentiel des revenus pour la musique :

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Selon une étude de Goldman Sachs d’ici 2030, 1,15 millards de personnes dans le monde seront abonnés à un service de streaming ce qui ferait passer le marché de la musique à 41 Milliards de dollars soit un niveau bien plus haut que 2001 l’année record du CD (voir ci-dessus)

UNE MULTITUDE D’INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES PEUVENT ACCELERER LA TRANSFORMATION DE L’INDUSTRIE MUSICALE

J’en ai retenu trois.

L’intelligence Artificielle

Dans la filière musicale, l’AI (Artificial Intelligence en anglais) peut améliorer sensiblement le management des méta données associées à la musique. Ce sujet est crucial et je vous renvoie à cette petite vidéo et l’explication brillante sur le site de SOUNDCHARTS

L’intelligence artificielle peut également intervenir dans la composition de musique. De nombreuses start-ups sont déjà sur ce chapitre dont la start-up la start-up Muzeek, -fondée par André Manoukian – dont la technologie est capable de décliner les compositions de « vrais » artistes pour les adapter automatiquement aux images qui lui sont soumises, et en faire donc de nouvelles compositions.

Enfin, l’intelligence artificielle va permettre au site de streaming de s’améliorer dans la génération automatique de playlist, ce qu’ils font déjà grâce aux algorithmes, notamment les playlists contextuelles.

Les enceintes connectées et le contrôle vocal

Le contrôle vocal grâce aux technologies de Google, d’Apple (Siri) ou encore d’Amazon (Alexa) est un changement de paradigme pour la musique..

L’histoire de la musique enregistrée a toujours été corrélée à l’évolution de la technologie. Depuis une petite dizaine d’année, avec l’avènement du streaming, le smartphone était devenu le centre névralgique de l’écoute de musique. Il perd désormais ce statut roi dans la mesure ou l’écran n’est plus nécessaire pour piloter sa musique.

La facilité de la commande vocale permet de toucher de nouvelles « cibles » et notamment les seniors mais aussi les enfants.

De plus, grâce à ces enceintes l’écoute de musique augmente. Une étude -que vous pouvez trouver ici – démontre que les consommateurs qui utilisent une enceinte connectée passe plus de temps à écouter de la musique : 34% des détenteurs d’enceinte Amazon Echo ou Google Home passaient plus de 4 heures par jour à écouter de la musique alors que ce pourcentage est de 24% pour le reste de la population.

La croissance forte dans les marchés émergents

Les rapports de l’IFPI montre depuis trois une croissance plus forte dans les marchés de la musique émergents : +17% en 2018 en Amérique du Sud, +12% en Asie par exemple. Quant à la Chine, elle est déjà 7e marché mondial alors qu’elle n’apparaissait pas dans le Top 20 il y a 4 ans….

Ces marchés émergents sont également source de nouveaux répertoire et catalogue. La musique globalisée n’est plus uniquement anglo-saxonne, comme nous pouvons constater dans le TOP 10 singles et album mondial en 2018 :

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En 20 ans, internet a bouleversé totalement l’industrie de la musique et cette dernière s’est complètement reconfigurée.

Dans le monde, la croissance dépasse les prévisions. Le streaming va s’ouvrir dans de nouveaux marchés. La démocratisation du streaming va permettre à des millions de nouveaux consommateurs d’écouter de la musique.

En France, on ne compte que 6 millions d’abonnés seulement à un service de streaming, la marge de progression est considérable et l’optimisme est donc de rigueur.

La filière musicale est de nouveau une filière d’avenir.

Marché de la musique : une nouvelle ère et des investisseurs qui reviennent.

spotify-numero-un-mondial-de-la-musique-en-streaming-fait-son-entree-en-bourse-a-new-york-le-3-avril-2018_6039048-770x515Il y a quelques jours l’IFPI (Fédération Internationale des Industries Phonographiques) publiait les chiffres 2018 du marché de la musique. Celui-ci s’établit désormais à 19,1 milliards de dollars et, pour la 4e année consécutive est en hausse (+9,7%) porté par la forte croissance du streaming en abonnement qui fait un bond de +32,9%. Preuve que le marché de la musique est entré dans sa 4e année de son “nouvel âge” : l’age de l’accès.
 

AGE DE L’ACCES : 4 ans 

 
2015-2019, ce sont les quatre premières années de l’âge de l’accès pour l’industrie de la musique enregistrée.
 
Quatre ans, c’est “jeune comme âge pour un marché” m’a dit un jour un investisseur. En effet, avec 255 millions d’abonnés à un site de streaming dans le monde, la grande partie du développement du streaming musical dans le monde reste à venir.  Et les marchés comme la Chine, l’Inde et l’Amérique Latine sont en train d’exploser.
 
Mais en quatre ans,  il s’est déjà déroulé un nombre de faits importants….comme une enfance accélérée.
Quelques jalons importants – entre autres – qui structurent le marché :
 
En Avril 2015,  Jay-Z convie de nombreux artistes, tels que BeyoncéMadonnaDaft PunkKanye WestRihanna, ou Arcade Fire pour présenter son service de streaming musical : TIDAL
 
En Juin 2015, Apple décide, sept ans après Spotify et huit ans après Deezer, de rentrer sur le marché du streaming en lançant AppleMusic son service de Streaming en abonnement. Ce lancement marque le début de cette nouvelle ère pour le marché de la musique comme je l’avais écrit ici : Spotify et Apple vont-ils pouvoir “monétiser” les consommateurs prêt à payer de nouveau pour la musique ?
 
En janvier 2017, Sprint, opérateur de télécom américain, acquiert une participation de 33 % de Tidal pour 200 millions de dollars.
 
En Décembre 2017, Le géant des Télécom Tencent acteur majeur du streaming en Chine annonce un accord de participation croisée avec Spotify. 
 
En Avril 2018, Spotify entre en Bourse et est valorisée 26 Milliards de dollars.
 
Juin 2018, Après plusieurs tentatives infructueuses (YouTube Music Key, YouTube Red …) YouTube lance YouTube Music Premium, son service de musique en streaming par abonnement . 
 
Octobre 2018 : Nouvelle levée de fonds pour Deezer et une entrée au capital du fonds d’investissement Kingdom Holding Company (KHC) et Rotana, le plus grand groupe de médias du Moyen-Orient
 
Octobre 2018 Spotify prend une participation minoritaire dans DistroKid, une plateforme de distribution pour les musiciens amateurs et semi-pro, concurrent direct de TuneCore et CD Baby.
 
Décembre 2018, le marché de l’Inde se prépare au grand bouleversement du streaming. Afin d’anticiper sur l’arrivé de Spotify en Inde, JioMusic, qui appartient au groupe de télécom Reliance fusionne avec le service de streaming Saavn en Inde 
 
Décembre 2018, Tencent Music entre en bourse est est valorisé 21,3 milliards de dollars.
 
Février 2019, SoundCloud se lance dans la distribution digitale pour ses abonnés. 
 
Mars 2019, L’Europe vote la nouvelle directive du droit d’auteur qui, entre autres, revient sur le statut d’hébergeur. Vers un début de résolution du Value gap avec YouTube ?  La compétition entre les services de streaming en abonnement et YouTube pourrait prendre une tournure différente.
 
Bref, en quatre ans, le marché de la musique en streaming a déjà commencé à se structurer, se “financiariser” et se globaliser.
 
Avec la perspective d’un marché mondial très important, les investisseurs reviennent.  Universal, acteur leader du secteur pourrait être valorisé plus de 40 Milliards de Dollars. 
 
 

LES INVESTISSEURS ET LE NUMERIQUE SE PENCHENT DE NOUVEAU SUR LE BUSINESS DE LA MUSIQUE

 
L’innovation est un moteur pour la croissance du marché de la musique. j’en avais déjà parlé ici même en 2016.
Et depuis quelques temps, de nouvelles structures d’incubation se créent. Les initiatives suivantes en sont la preuve :
-Techstars music Accelerator revient pour la 3e année avec un programme d’investissement dans 10 start-up. 
-Scooter Braun, entrepreneur et manager de Justin, Bieber, Ariana Grande, Kayne West etc. crée son programme d’investissement dans les start-up musicales Raised In Space,
et enfin, signe des temps, les célèbres et mythiques Studios Abbey Road, lancent une nouvelle structure Abbey Road Red pour faire le lien entre les innovations technologiques et la musique.
 
J’espère que ces récentes initiatives marquent le début d’une nouvelle ère pour l’innovation et la musique, car la filière musicale ne peut pas se reposer uniquement sur les GAFA pour innover. Apple, Amazon, Google, Facebook peuvent se permettent d’innover à perte. Leur laisser seules maitriser l’innovation, c’est leur donner le pouvoir de réguler.
 

L’AGE DE L’ACCES. ANNEE 4. UNE NOUVELLE ERE.

Le marché de la musique reprend, dopé par son nouveau modèle, celui de l’abonnement, et même si il n’a pas encore atteint son niveau de 2001, mais les projections des revenus pour les producteurs et ayants droits sont encourageantes.
Le numérique et les investisseurs rencontrent de nouveau le business de la musique, pour le meilleur et pour le pire ? 
Pour le meilleur j’espère.

The Music User Experience Revolution

“Alexa, joue moi le titre de ce groupe des années 80 avec les paroles qui commencent par “yesterday i got so old..”

Et mon enceinte connectée Echo -grâce à la technologie de reconnaissance Alexa – de jouer “In Between Days” du groupe The Cure.

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L’enceinte connectée et sa technologie de reconnaissance  vocale est une révolution pour l’usage et l’expérience de la musique. Un sujet au coeur des préoccupations de la musique numérique, un sujet qui me passionne et que j’ai souvent développer sur ce blog ici.

 

AMAZON vs GOOGLE vs APPLE : L’ENCEINTE CONNECTEE COMME CHEVAL DE TROIE DU MARCHE DU STREAMING MUSICAL

 

Amazon a lancé en France son enceinte connectée Echo, le 6 Juin, cheval de Troie de son service de streaming “Amazon Music Unlimited”. Une offre commerciale de lancement agressive “à la Amazon” : Tous les abonnés PRIME auront 40 heures de musique gratuite sans débourser un euro de plus. Un avant gout du service de streaming illimité d’Amazon lancé à l’automne dernier, une technique infaillible pour une conquête de part de marché rapide sur le marché du streaming. Dans un second temps, les abonnements musique seront proposés 8€ au lieu de 10€ pour un abonnement concurrent, Deezer ou Spotify par exemple.

 

Il y a quelques semaines Google, déjà présent en France depuis Aout 2017 avec son enceinte connectée Google Home, annonce le re-lancement de son service de streaming musical -YouTube Red est rebaptisé YouTube Music- soit l’intégralité du catalogue musical accessible de façon illimitée, sans publicité avec l’écoute de morceaux hors connexion et la lecture de musique en arrière-plan, fonctionnalité demandée depuis longtemps par les utilisateurs de YouTube.

 

Apple s’apprête a lancer son enceinte connectée le HomePod le 18 Juin, qui permettra de se connecter à son service de streaming Apple Music lancé en France en Juin 2015.

Ce printemps 2018 marque donc un tournant dans le marché de la musique numérique.

THE MUSIC USER EXPERIENCE REVOLUTION

Pourquoi les enceintes connectées vont elles modifier à tout jamais le lien qui unit le consommateur à sa musique ?

L’histoire de la musique enregistrée est corrélée à l’évolution de la technologie. En matière d’accès aux contenus, l’innovation technologique essentielle de ce début de siècle est le streaming. Chaque innovation technologique entraine avec elle une révolution des usages.La commande vocale est une révolution des usages. Depuis l’avènement du streaming, le lien du consommateur avec sa musique se faisait via écran. Désormais, pfff…. fini l’écran, le consommateur se débarrasse de son mobile.

NOUVELLES CIBLES, NOUVEAUX ESPACES.

La facilité de la commande vocale permettra de toucher la cible des seniors mais aussi celle des enfants. Cette technologie permet également de remettre la musique au centre des pièces à vivre notamment le salon ou trônait autrefois cette bonne vieille chaine hi-fi.

AUGMENTATION DE LA CONSOMMATION DE MUSIQUE.

Une étude -que vous pouvez trouver ici – montre que les consommateurs qui détiennent une enceinte connectée passe plus de temps à écouter de la musique : 34% des détenteurs d’enceinte Echo ou Google Home passaient plus de 4 heures par jour à écouter de la musique alors que ce pourcentage est de 24% pour le reste de la population.

CHANGEMENT DE PARADIGME DANS LE MARKETING ET LA DATA LIEE A LA MUSIQUE.

Les données associées à la musique, renseignées par les ayants droits -producteurs et éditeurs- sont désormais un facteur clé de succès majeur pour émerger lors d’une commande vocale d’un titre. Plus les données associées à un titre sont riches et pertinentes, plus les différentes technologies de reconnaissances -Alexa, Siri, Google Actions ou Cortana…- ont des chances d’identifier et recommander le dit titre.

Ce n’est donc pas étonnant que Nielsen ait payé 560 Millions de dollars pour l’acquisition de Gracenote, spécialiste de la data qui fournit les données associées pour Apple pour plus de 100 millions de titres musicaux et autres et 12 millions de films et de séries.

Une chanson, pour avoir une chance d’être écoutée -dans l’océan des 50 millions de titres présents sur les services de streaming- doit posséder des données associées pertinentes, et pas seulement les données “basiques” (producteur, éditeur, auteur et compositeur, paroles etc, ) mais aussi des données sur le style, mood, tempo, et toutes sortes de données émotionnelles associées. Les ayants droits doivent maîtriser et enrichir les données associées s’ils veulent garder le contrôle de la recommandation.

SMART SPEAKER : UN MARCHE QUI DEPASSE L’ENJEU DES VENTES DES OBJETS CONNECTES.

Un marché en pleine explosion comme expliqué il ya quelques temps sur ce blog.

Mais la bataille entre Google, Amazon, Apple pour les enceintes connectées dépasse l’enjeu des revenus de la vente de ces objets connectés. Les revenus proviendront de la vente d’autres produits et d’autres services. La musique comme produit d’appel ce n’est pas nouveau : iTunes puis Apple Music ont largement contribué à la vente de iPod (jadis), Iphone et autre Mac; YouTube est la première destination au monde de musique mais son modèle économique est la vente de publicité et de données personnelles.

Pour ne prendre que l’exemple d’Amazon : Alexa, son système de reconnaissance vocale, répond à des questions, donne le bulletin météo, commande les objets connectés de la maison mais il permet surtout de faire ses courses sur Amazon.

La croissance du marché de la musique accélérée par les SMART SPEAKERS

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Les industries de la musique ont été transformées en profondeur ces dernières années. Le streaming a bouleversé les modèles économiques, mais aussi les stratégies de communication, marketing et promotionnelles. C’est un sujet qui me passionne et que j’avais déjà pris plaisir à développer sur ce blog dès 2015 notamment dans cet article
Une nouvelle révolution accompagne celle du streaming : l’avènement des enceintes connectées, encore appelées “Smart Speakers” comme évoqué en septembre 2017 ici.

Les enceintes connectées modifient la relation du consommateur à sa musique, quelque soient les différentes catégories de consommateurs de musique : des plus “fidèles” (aficionados) au plus “volages”. Elles permettent également d’attirer les “casual listeners” et les seniors conquis par la praticité de la reconnaissance vocale.
Ces smart speakers vont définitivement changer la donne et accélérer la croissance du marché de la musique, portée par l’insolente croissance du streaming.

L’histoire de la musique enregistrée est celle des inventions. Depuis le cylindre jusqu’au mp3 en passant par le vinyle et le CD, les  technologies ont toujours eu un impact sur le marché de la musique.
L’innovation technologique majeure de ce début de siècle est le streaming. La reconnaissance vocale et des enceintes connectées “intelligentes” en sont l’accélérateur.

L’enceinte connectée porte la croissance du streaming 

48% des détenteurs de smart speakers sont abonnés à un service de streaming, un des chiffres clés révélés dans une étude récente élaborée par le BPI (association regroupant l’ensemble des éditeurs phonographiques en Angleterre ) et ERA (Entertainment Retailers Association) que vous pouvez trouver ici.

Les Etats-Unis, premier marché mondial de la musique, donnent souvent le ton pour l’évolution du business de la musique. Il convient de regarder ce qui se passe là bas : Il s’est vendu plus de 20 Millions de smart speakers en 2017. Selon l’étude the SMART Audio Report produite par la radio nationale américaine NPR, 7% des Américains ont déjà un smart Speaker et 4% en ont eu un pour Noel. Cette étude montre que la musique est l’activité principale pour laquelle le consommateur utilise son smart speaker. A mettre en corrélation avec le nombre d’abonné à un service de streaming qui a augmenté de +56% en 2017 portant le nombre d’abonnés à 35 Millions aux Etats Unis.

Cette même étude prévoit que 55% des foyers américains possèderont un smart speaker en 2022.

La fin de la période “Mobile Roi” pour l’écoute de musique

En septembre 2017 une étude de l’IFPI ( l’Association mondiale des éditeurs phonographiques) montrait que le mobile était l’appareil sur lequel 90% des consommateurs abonnés à un service de musique écoutaient leur musique.
Les Smart Speakers vont mettre fin à cette suprématie, celle des fabricants de téléphone.

Plus besoin d’écran, le fan de musique peut piloter ses choix musicaux grâce à une commande vocale. Il se débarrasse ainsi de l’écran et de son mobile comme interface.
La relation entre son lecteur de musique et le consommateur devient plus fluide et plus intuitive.

Adieu les radios musicales ?

Ces appareils vont se démocratiser dans le foyer et la voiture qui restent les endroits de prédilection pour écouter de la musique et peuvent concurrencer directement les radios musicales.
Dans cette même étude BPI/ERA, 39% des détenteurs de smart speakers déclarent que le temps passé à écouter la radio est remplacé par le temps passé à écouter leur smart speaker.

La radio détrônée ? Pas pour tout de suite, mais les radios musicales ont du soucis à se faire….

GAFA et fabricants d’enceintes connectées

Le marché des enceintes connectées est un marché en pleine explosion.
Selon plusieurs études spécialisés, les ventes devraient se multiplier par 6 en 3 ans, comme on peut le voir sur cette infographie :

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Amazon avec son système de reconnaissance Alexa domine le marché actuellement avec plus de 70 % des ventes grâce à son Amazon Echo lancé en 2015.
Google est en train de rattraper sont retard sur ce marché. Avec son Google Home, en 2017, il multiplie par trois sa part de marché. Nul doute que sa part de marché va continuer à croitre grâce à sa capacité à exploiter le technologie Google, celle du moteur de recherche mais également l’apprentissage automatique par intelligence artificielle encore appelé “machine learning”.
L’arrivée d’Apple sur ce marché, avec le Home Pod devrait modifier les parts de marché de chacun. Les clients Apple ont pour habitude de privilégier les produits maison pour rester dans l’écosystème Apple.

En matière de musique, Amazon, Apple et Google ont une longueur d’avance car ils ont chacun un service de streaming musical qu’ils peuvent “bundliser” avec leur enceintes connectées.

Mais tous les fabricants d’électronique s’y mettent : Samsung (et son système de reconnaissance vocale Bixby) Panasonic et ses twin tower, JBL et ses JBL Link, LG, Sony etc…sans compter le pionnier du genre Sonos. Il semblerait que Spotify réfléchisse à lancer son propre smart speaker comme le révélait cet article dans Billboard.


CROISSANCE DU MARCHE DE LA MUSIQUE :  LES SMART SPEAKERS CHANGENT LA DONNE
En conclusion, le marché de la musique ne s’est jamais aussi bien porté et les smart speakers vont porter cette croissance de façon exponentielle. La deuxième révolution, après celle du streaming, c’est celle les smart speakers.

Transformation digitale ou conduite du changement ?

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“Transformation digitale” : Ces deux mots sont souvent répétés comme un mantra dans les comités de direction, les directions marketing et commerciales, dans les cabinets de conseil, les entreprises de formation jusqu’aux médias qui en font un sujet à la mode.

Je n’ai pas l’intention de couvrir ce vaste sujet en un seul article mais seulement de vous faire part de mes réflexions, Et puisqu’un ami très cher, qui vit loin de ces préoccupations, m’a demandé de lui expliquer la “transformation digitale”, l’exercice valait de le partager.

Cette humble réflexion, est née tout d’abord de mon expérience de la transformation digitale dans l’industrie de la musique, de mes lectures sur le sujet mais aussi de nombreuses discussions avec des dirigeants de l’édition littéraire – suite à mon intervention aux Assises du Numérique de leur syndicat – et des dirigeants de start ups.

Alors, pour l’entreprise la “transformation digitale” c’est quoi ?
Cette expression est un vrai fourre tout. Deux mots “valises” : “transformation” désigne à peu près tout et “digital(e)” est un mot qu’on colle à toutes les sauces.

L’enjeu est de taille : Un rapport élaboré par le cabinet de conseil Mc Kinsey sur la “mutation numérique des entreprises” montre que l’augmentation brute potentielle du résultat opérationnel pour une entreprise qui réussit sa mutation numérique pourrait être de +40 %. Par contre, le risque de réduction du résultat opérationnel pour une entreprise qui ne parviendrait pas à s’adapter au numérique serait de -20%.

Il convient, dans un premiers temps, de le mettre au pluriel : Les transformations digitales.

Les transformations digitales touchent pratiquement tous les types de secteur d’activité car elle modifie des fondamentaux du business.

Première transformation, celle de la digitalisation et de la simplification des process. La mutation numérique est dans ce cas synonyme d’optimisation et réduction des couts. C’est la transformation la plus rapidement intégrée et comprise par les entreprises. D’autant mieux qu’elle est souvent pris en charge par le département informatique, plus connu désormais sous le nom d'”IT” et qui met en place les nouveaux outils technologiques.

Deuxième transformation, celle de la “donnée”, “data” en anglais. Un ensemble de données gigantesque, appellé “Big Data” ( de nombreux ouvrages si vous voulez creuser le sujet dont “Big Data” de Mayer-Schoneberger et Cuvier) qui, pour ne parler que de l’aspect économique, engendrent des opportunités et leviers de business énormes J’en veux pour preuve la puissance de ceux qui en ont fait leur coeur de métier : Google, Amazon, et Facebook.

Troisième transformation : celle du marketing, de l’e-promotion et l’e-reputation. Le contenu devient “digital” et “brand content”. La marque devient un média et le marketing des 4 P de l’histoire ancienne : Le marketing tel qu’on la connu est mort, il doit être remplacé mais cela mériterait un livre entier.

Quatrième transformation, celle du nouveau “parcours client” : on passe du commerce multi canal à omni-canal, transformant ainsi le marketing et la vente. Selon la meme étude Mc Kinsey les entreprises pourraient augmenter potentiellement leur résultat opérationnel de 12 % grâce au développement d’une expérience client omni-canal.

Cinquième transformation : celle de l’Innovation. Innover grâce au numérique, devient plus facile.L’innovation est meme moteur des écosystèmes numériques.L’innovation comme recherche constante de diversification. Des ouvrages comme “The Lean Startup” d’Eric Ries vous permettent d’en savoir plus si vous le souhaitez. La préoccupation centrale devient surtout, pour la survie de l’entreprise, d’appréhender la disruption intervenant dans le secteur. Aucun doute que les dirigeants de G7 savent très bien de quoi je parle….

Sixième transformation et – pour moi- la plus grande transformation : celle du consommateur. Le consommateur devient acteur, modifiant à tout jamais son rapport avec l’entreprise et les marques qu’elle représente. Sur les cendres du département marketing nait le département “consommateur”.
Complexe car au carrefour du commercial, marketing et de la technologie, les transformations numériques n’ont fait qu’accentuer le véritable changement de paradigme : le consommateur est désormais au centre du système.

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Bien entendu les transformations numériques sont différentes selon les secteurs d’activité. Le secteur du tourisme, où près de la moitié des clients réservent leurs voyages en ligne, a ainsi déjà largement fait sa mutation digitale, doublé d’une transformation du modèle économique. Par exemple, les voyagistes ont dû repenser le rôle des agences physiques et le faire évoluer de la vente vers le conseil, tandis que les compagnies aériennes ont largement réintégré la vente en direct des billets d’avion.

Il existe une seconde catégorie d’entreprises : Les industries créatives du contenu. Pour ce secteur la transformation digitale, c’est aussi, en plus, la digitalisation du produit que l’entreprise commercialise.
C’est ce que j’ai connu dans l’industrie de la musique qui a été la première industrie à voir son produit “digitalisé”.
Même si la norme de compression et le format mp3 apparait en 1995, je situe le début de révolution numérique dans l’industrie de la musique à l’apparition du peer to peer – Napster notamment – en 1999.
Pendant plus de quinze ans, l’industrie de la musique a “subi” une double “transformation digitale” suivie dès 2008 d’une mutation des modèles économiques puisque qu’en cinq années, le “business model” de la musique enregistrée est passé de la “possession” à l”accès” Pour cette raison de sa trajectoire est intéressante. D’autres secteurs connaissent depuis cette triple mutation – la transformation numérique, celle du produit, celle du modèle économique – il s’agit de la presse, l’édition littéraire, le cinéma etc…mais je ne vais pas m’étendre car j’ai de nombreuses fois écrit à ce sujet sur ce blog.

Transformations numériques ou conduite du changement ?

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Un décalage s’est créé entre l’adoption du numérique par les particuliers et celui des entreprises.

L’étude réalisée par Mc Kinsey, en analysant les composantes du PIB numérique, démontre que la France se classe au 4ème rang de l’échantillon de 13 pays au regard de la consommation privée, mais seulement au 9ème rang en matière d’investissement privé, ce qui suggère qu’en France le PIB numérique est tiré par les consommateurs. Les internautes français ont déjà largement adopté les nouveaux usages numériques alors que les entreprises sont en retard.

Pourquoi les entreprises ont elles pris du retard ?

-Des organisations en silos non adaptée, par nature, à la transformation numérique qui doit être transversale entre métiers et fonctions.
-Un manque de “talents” : Les entreprises rechigne a embauché des jeunes avec des compétences numériques.
-Un manque d’implication du top management dans les problématiques numériques.

Les grandes entreprises du siècle dernier se sont formées sur des fondamentaux qui ont atteints leurs limites : productivité individuelle, organisation en silos, management vertical et pyramide décisionnelle, verrouillage du marché par des brevets, spécialisation des profils etc.

Les transformations numériques sont souvent un chantier douloureux car les bénéfices ne sont pas tout de suite perçus, mais elle constituent une occasion unique d’enclencher un cercle vertueux en réinvestissant, à terme, les gains de productivité pour améliorer l’offre consommateur et donc accroitre l’avantage concurrentiel.

La conduite du changement est le sujet, les transformations digitales ne sont que le paysage.

La conduite du changement passe par un changement de culture de l’entreprise, largement alimentée par l’evolution des pratiques et méthodes de travail entre collaborateurs.

La résistance au changement est naturelle, surtout quand on annonce des vérités qui donnent le vertige – 60% des jobs de 2025 n ‘existent pas encore – mais la conduite du changement est un préalable nécessaire si les entreprises veulent survivre.
Avant d’être attaquées fortement par des acteurs fortement disruptifs, les entreprises doivent avoir le courage d’adopter des pratiques plus agiles.

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La conduite du changement est un impératif urgent pour la survie des entreprises pour leurs marges mais aussi, et surtout, pour leurs hommes.

 

Découverte musicale ou tyrannie du choix ? More is Less.

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Le choix illimité et la découverte de musique sont-ils compatibles ?

Depuis l’avènement du numérique, l’histoire de l’industrie de la musique est jalonnée de dates importantes : 2001, le procès Napster; 2003, le lancement d’iTunes; 2007, Blogmusik puis Deezer; 2008, le lancement de Spotify.
2014 marquera l’année de la consécration du streaming mais aussi de ses paradoxes.

Pour les fanatiques de musique, le streaming, c’est la “terre promise”. Ce qu’on pouvait rêver de mieux dans nos rêves les plus fous. C’est la caverne d’Alibaba, comme rentrer dans une confiserie et tout dévorer, sans limite.

Mais pour les “non fanatiques”, juste les gens “normaux” ?

Les services de streaming donnent accès à l'”illimité”. Mais, ces derniers sont face à un paradoxe. Devant trop de choix, la passivité s’installe voir l’angoisse. Plus le choix augmente et plus la satisfaction baisse. Dans son ouvrage “Le paradoxe du choix” le psychologue américain Barry Schwartz explique – avec talent- que le choix ne nous rend pas plus libres mais plus paralysés, pas plus heureux mais plus insatisfaits.

La plupart des “consommateurs” de musique n’ont pas le soucis de la “découverte”. Seuls professionnels s’en persuadent.
Si on exclut les personnes qui consomment la musique comme une addiction -comme moi- la plupart des gens veulent juste “écouter de la musique”. Pour cette raison, la radio reste un média puissant. C’est d’ailleurs ce que révèle la dernière étude conduite par MELTY pour mesurer les pratiques du streaming auprès des jeunes : Si les sites de streaming sont le vecteur de découvertes musicales pour 48% des meltynautes interrogés, la radio et la télévision restent des médias très influents, cités à hauteur de 50% et 39% respectivement.

Alors, que faut-il pour que le consommateur ne soit pas angoissé en arrivant sur une plateforme de musique face à 30 millions de titres ?
Il faut un “filtre”, un “curator”, un “guide”. Algorithme ou recommandation humaine, on en revient au rôle premier des médias dit “spécialisés” et du bon vieux “disquaire”, ce copain qui guidait mes choix quand j’étais adolescent.
C’est finalement l’imprévu et la surprise qui nous donne le plus de plaisir. Et ceci dans de nombreux domaines, comme le démontre Renata Salecl dans “la Tyrannie du Choix” dont je vous recommande la lecture.

Pour les services de streaming “LE PARADOXE DU CHOIX” c’est que MORE IS LESS.

1989 (courtesy of Taylor Swift ?)

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J’aimerais revenir en 1989.

Le monde changeait à notre vitesse. L’entreprise était stable et sécurisante. Nous vendions des produits à des consommateurs. Chacun avait sa place. Chaque action marketing, promotionnelle ou commerciale avait des répercutions tangibles. Il était possible de prévoir. Pour l’industrie de la musique,1989 est l’année de l’explosion du marché du CD, format qui, pendant quinze ans, entrainera une croissance formidable de ce secteur.

Je ne pourrai jamais revenir en 1989.

L’album de la jeune Taylor Swift s’appelle 1989. Hasard sans doute.
Il y a quelques jours, Taylor Swift – enfin… son équipe de management et/ou sa maison de disque – retire son album des services de streaming, lui préférant le modèle du téléchargement.
Le management de Taylor Swift cherche à optimiser les ventes dans une vision court terme. Il s’agit de “milker” comme diraient les consultants des années 90.
Deux jours plus tard, Daniel Ek, PDG de Spotify, se positionne en leader des services de streaming en lui faisant une réponse bien argumentée.
Ces échanges épistolaires peuvent paraître anodins mais sont un signe de la difficulté pour les acteurs en présence de voir leur monde changer, se transformer.
Et YouTube d’annoncer hier son service de streaming payant avec un prix mensuel de l’abonnement à 7,99 euros qui fixera, sans aucun doute, le nouveau prix du marché.
On peut le regretter mais le monde de 1989 n’existe plus.
L’ âge de la possession et son modèle du téléchargement appartiennent définitivement au passé.
L’industrie de la musique enregistrée est entrée dans l’ “âge de l’accès” pour reprendre le titre de l’ouvrage visionnaire de Jeremy Rifkin cité de nombreuses fois dans ce blog.
Le nier est nier le monde dans lequel nous vivons. Ne pas s’adapter, c’est refuser d’écouter le consommateur et donc renvoyer les fans de musique vers l’illégalité.
Le streaming est la seule innovation disruptive que l’économie de la musique ait connu depuis l’invention du support au début du siècle dernier. Comme décrit dans “The innovator’s dilemma”, livre de référence de Clayton Christensen, professeur à Harvard, une innovation disruptive est une innovation qui, dans un premier temps, se traduit par une baisse de la qualité, puis parvient ensuite en répondant à des logiques financières différentes, à changer définitivement l’équilibre entier d’un secteur.
Qu’on le veuille ou non, le streaming transforme de façon définitive le modèle économique et les techniques de marketing du marché. Ce faisant, il modifie les relations entre consommateurs et artistes. Ces changements auront pour conséquence de transformer les organisations.Soit dans la douleur, soit dans l’action.

De quoi « Songs of innocence » est-il le chant ? (courtesy of U2)

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Sauf si vous étiez sur une île déserte la semaine dernière, vous avez  sans doute appris que U2  a donné son nouvel album “Songs of innocence”  à 500 millions d’utilisateurs Apple.

Cet évènement, annoncé lors la keynote d’Apple le 10 septembre par Tim Cook, le PDG d’Apple, n’était qu’un “one more thing” après l’annonce de la montre et de l’iPhone 6,  mais il est malgré tout suffisamment important pour s’y arrêter quelques minutes.

Les plus avertis diront “rien de nouveau sous le soleil”. En effet, la musique comme “produit d’appel” possède un fort pouvoir d’attraction pour vendre un produit ou un service. Dans le jargon des opérateurs de téléphonie, c’est aussi un levier efficace de “rétention” des consommateurs. La musique est gratuite certes, mais pour y accéder il faut acheter un ordinateur ou un smartphone, une connexion internet ou un abonnement téléphonique etc.

Nous avions été habitués à quelques centaines de milliers d’exemplaires « offerts »  – Prince en 2007 et son nouvel album ‘planet earth’ avec un célèbre quotidien anglais – puis un million d’exemplaires avec JayZ et Samsung en Juin 2013. Dans le cas présent, le volume change puisque l’album est donné à 500 millions d’utilisateurs. J’attends avec impatience la barre du milliard.

Rien de nouveau sous le soleil également en terme médiatique. Un coup “marketing” de ce groupe, autrefois important, aujourd’hui dépassé par les Coldplay, Linkin Park et autres Black Keys. U2 vend moins d’albums et cette exposition médiatique permet de compenser le manque de proposition artistique du groupe. U2 et Apple sont proches depuis longtemps, et cette proximité est renforcée par l’arrivée chez Apple de Jimmy Iovine, producteur et « music business executive » de renom. Racheté au prix d’un footballeur, Jimmy Iovine, est désormais chez Apple le remplaçant de Steve Jobs dans le rôle de « l’ami des artistes ». Il est le co-fondateur de Beats avec Dr Dre, société rachetée avant l’été par la firme à la pomme, comme détaillé dans mon post du 3 juin sur ce blog.

Tout ceci permet au cours de l’action Apple de grimper. Ce dernier n’a jamais été aussi haut, atteignant 101,73 dollars ce samedi 13 septembre.  Cette hausse reflète la confiance retrouvée des investisseurs en Apple grâce à la capacité du PDG Tim Cook à déjouer la concurrence et élargir le champ d’action de l’entreprise fondée par le visionnaire Steve Jobs. Désormais, la firme voit sa capitalisation grimper jusqu’aux 602 milliards de dollars, de loin l’entreprise la plus cotée en bourse.

Alors, de quoi cet événement est-il le symbole ?

Il est le symbole de l’avènement de « l’âge de l’accès », pour reprendre le titre de l’ouvrage visionnaire de Jeremy Rifkin, qui, dès 2001, décrivait la fin de la possession et le monde de l’accès.

Il est le chant du cygne du download.

Si le marché de la musique digitale est en croissance, c’est grâce au streaming. Le download est déjà en forte décroissance dans de nombreux pays.

A l’heure ou en France, le SNEP ( syndicat national des éditeurs phonographiques ) lance le premier “hit parade” streaming ( les 200 titres les plus streamés ), MIDIA Research ( www.midiaresaech.com ) révèle dans sa passionnante étude de prospectives que le chiffre d’affaires mondial du streaming devrait augmenter de 240% jusqu’en 2019. Ainsi, il représenterait 71% des revenus digitaux et 41% du chiffre d’affaires global en 2019.

Offrir cet album de U2 est donc un outil de plus pour Apple pour garder ses consommateurs dans l’écosystème Apple, les préparer au lancement du service de streaming Beats / iTunes Music et assurer la transition du download vers le streaming.

Cet épisode est aussi une nouvelle preuve de la lente mutation -ou disparition- du format album.

A l’heure du streaming, la musique se consomme de plus en plus sous forme de playlist grâce aux algorithmes de recommandation et aux données sociales. C’est le retour du single et de la force du “track”. La forme artistique de l’album n’est sans doute pas morte mais elle ne sera plus la principale.

Le format album dans sa phase mature est apparu dans les années soixante. L’évolution de la technique permettait des plages plus longues, libérant ainsi les artistes de certaines contraintes. Des groupes comme les Beatles, Pink Floyd, ou Led Zeppelin firent ainsi avancer la création en s’appropriant ce format. Cette avancée technologique permit de sortir des albums qui resteront dans l’histoire de la musique du 20e siècle.

Aujourd’hui, les avancées technologiques permettent de nouveau une mutation du format. Un album qui reflète l’univers de l’artiste devrait être désormais interactif, dynamique, mis à jour régulièrement, et inclure de l’audiovisuel, des jeux, des textes etc. La technique permet tout cela. Comme développé par Mark Mulligan sur son excellent blog http://musicindustryblog.wordpress.com , je pense également que c’est aux artistes de se réapproprier ce format de la création. Les producteurs devraient les y aider.

Le format album est mort. Une occasion pour le réinventer.